1. DâaprĂšs toutes les preuves scientifiques, les plantes, nâayant pas de systĂšme nerveux, ne sont pas conscientes, donc elles ne peuvent pas souffrir.
2. DâaprĂšs toutes les indications scientifiques, les animaux, ayant un systĂšme nerveux, sont conscients, donc ils peuvent souffrir.
3. MĂȘme si les plantes Ă©taient conscientes, les humains nâauraient pas de choix pour survivre que de les consommer; avec les animaux, on a le choix.
4. Donc invoquer la possibilitĂ© de la conscience et de la souffrance chez les plantes ne va pas seulement Ă lâencontre de toutes les preuves scientifiques, mais ça sert Ă camoufler lâoption morale urgente qui nous est ouverte avec une option qui nâexiste pas.
5. La souffrance que nous infligeons aux animaux est rĂ©elle, monstrueuse et Ă©vitable; arrĂȘtons de la justifier avec ce qui est inĂ©vitable.
Harnad: “1. DâaprĂšs toutes les preuves scientifiques, les plantes, nâayant pas de systĂšme nerveux, ne sont pas conscientes, donc elles ne peuvent pas souffrir.”
Imbs: Elles ne peuvent pas faire l’expĂ©rience de la douleur, faute de nocicepteur et d’autres formes de systĂšme nerveux. La souffrance, chez les plantes n’est pas semblable Ă ce que nous pouvons Ă©prouver.
Ăa câest basĂ© sur quoi? DâoĂč provient la preuve que les plantes ressentent quoi que ça soit? (Je ne dis pas que câest impossible; juste que câest extrĂȘmement improbable selon toutes les donnĂ©es qui existent jusquâici.)
Imbs: Les organismes dĂ©pourvus de systĂšme nerveux font toutefois montre de mĂ©canismes de dĂ©fense, et des caractĂ©ristiques propres Ă toute forme de vie : lâhomĂ©ostasie.
Ce sont des actions et des fonctions, certes, mais pas du ressenti. Personne ne dirait que les plantes nâont pas de mĂ©canismes dâaction et de rĂ©action. (Les organes isolĂ©s des vertĂ©brĂ©s ainsi que des invertĂ©brĂ©s ont les actions et les fonctions aussi; et les robots les ont aussi, y compris lâhomĂ©ostasie chez les servo-mĂ©chanismes. Ce nâest toujours pas le ressenti (sentience), donc a-fortiori pas la souffrance.)
Imbs: Les organismes vivants se rĂ©parent, et luttent contre leur propre dispersion, peu importe la conscience ou l’absence de conscience.
Mais quand il y a lâabsence de conscience ( = sentience, sensibilitĂ©) il y a lâabsence de souffrance, de douleur.
Harnad: “2. DâaprĂšs toutes les indications scientifiques, les animaux, ayant un systĂšme nerveux, sont conscients, donc ils peuvent souffrir.”
Imbs: Faux. Tous les animaux n’ont pas de systĂšme nerveux. Les Ă©ponges n’ont pas de systĂšme nerveux. Ce sont des animaux.
Jâai dit les animaux ayant un systĂšme nerveux…
Imbs: Par ailleurs, tous les animaux n’ont pas le mĂȘme systĂšme nerveux. L’Ă©crasante majoritĂ© des espĂšces animales sont invertĂ©brĂ©es, et rares sont les invertĂ©brĂ©s Ă possĂ©der des nocicepteurs.
Ăa câest incorrect. (Mais est-ce que lâargument ci-haut nâĂ©tait pas que les plantes souffrent malgrĂ© lâabsence dâun systĂšme nerveux?)
Imbs: C’est une condition nĂ©cessaire pour faire l’expĂ©rience de la douleur. La plupart des insectes ne ressentent probablement pas la douleur.
Ă lire: Klein, Colin and Barron, Andrew B. (2016) Insects have the capacity for subjective experience Animal Sentience 2016.100
Imbs: Le fait de possĂ©der un systĂšme nerveux n’est en rien la preuve qu’on soit capable de conscience. Avoir conscience, c’est “avoir conscience d’avoir conscienceâ.
Ăa câest une affirmation sans substance. Avoir conscience câest avoir le ressenti (la capacitĂ© Ă ressentir quoi que ça soit: chaleur, douleur, mouvement, son, lumiĂšre, contact, etc.). Si on ressent quelque-chose on ressent; si non, non. Câest ça la conscience. Le reste ne concerne que le contenu de la conscience, donc, ce que câest quâon ressent.
Imbs: C’est dĂ©jĂ bien difficile Ă prouver chez l’espĂšce humaine, et le fameux “je pense donc je suis” n’est venu que bien tardivement dans notre propre histoire philosophique.
Le « problĂšme des autres esprits » (comment ĂȘtre sĂ»r que les autres ressentent?) est insoluble, mais une solution avec certitude nâest pas nĂ©cessaire. On sait que les autres humains ressentent, et la plupart des animaux aussi. Ce nâest pas nĂ©cessaire de rentrer dans le dĂ©bat Ă©pistĂ©mologique. (Et le Cogito ne concerne que ma certitude que moi-mĂȘme je ressent. Ăa ne touche pas le problĂšme des autres esprits.)
Imbs: Les animaux ne pouvant pas disserter, il est strictement impossible de prouver la moindre conscience d’avoir conscience.
Ni chez les humains, pour exactement la mĂȘmes raison (le problĂšme des autres esprits: je ne peux ressentir que mon propre ressenti).
Imbs: Il reste possible de prouver la sentience, qui est quelque chose de beaucoup plus simple : ĂȘtre capable d’Ă©prouver une expĂ©rience subjective de la vie.
La sentience (le ressenti) est la mĂȘme chose que la conscience. Et toutes les expĂ©riences, Ă©tant ressenties, sont « subjectives » âŠ
Et ce qui est en jeu dans tout ça câest la sentience (en particulier, la souffrance), et non pas la capacitĂ© Ă la cogitation cartĂ©sienne…
Imbs: La maniĂšre la plus utilisĂ©e pour prouver la sentience chez un animal reste l’expĂ©rimentation animale.
On ne prouve pas, mais on fait lâinfĂ©rence dâaprĂšs les corrĂ©lats comportementaux et neuronnaux.
Imbs: Or encore une fois, il est bien difficile de prouver que les 99 % d’espĂšces animales soient sentientes, Ă©tant donnĂ© qu’il s’agit principalement d’invertĂ©brĂ©s. Comment fais-tu pour dĂ©montrer la sentience chez les cochenilles ou le vers Ă soie ?
On ne peut pas « dĂ©montrer » ni « prouver » la sentience d’autrui ( grĂące au « problĂšme de autres esprits » ); on peut juste infĂ©rer, dâaprĂšs ses corrĂ©lats. Et câest faisable, mĂȘme chez les invertĂ©brĂ©s. Mallatt, Jon and Feinberg, Todd E. (2016) Insect consciousness: Fine-tuning the hypothesis Animal Sentience 2016.118
Imbs: Donc non, la sentience n’est clairement pas un critĂšre suffisant, d’autant qu’il induit une recherche systĂ©matique.
CritĂšre Ă quoi? Câest la sentience qui est en jeu.
Imbs: Imagine une sociĂ©tĂ© dans laquelle une personne a Ă©tĂ© attrapĂ©e en train de vendre de la cochenille. Si il est interdit d’exploiter les animaux en raison de leur sentience, on ne peut pas sanctionner la personne sans avoir prouvĂ© que les cochenilles sont sentientes.
Idem pour son chien, et pour son enfant. ( « problĂšme des autres esprits » ). On ne peut pas « prouver un crime » non plus, juste fournir les donnĂ©es qui minimisent le doute. Et câest faisable â y compris chez les cochenilles.
Mais pourquoi est-ce quâon est en train de parler des plantes ou mĂȘme des cochenilles lorsque il y des milliards dâanimaux â concernant lesquels le doute serait pervers — que nous faisons souffrir inutilement?
Imbs: La probabilitĂ© est qu’elles ne le sont pas, mais de toute façon, il faut conduire des expĂ©rimentations sur ces animaux pour le dĂ©terminer.
Est-ce quâon peut mettre en attente les cochenilles et les plantes, pour dâabord rĂ©gler les horreurs oĂč il nây a point de doute raisonnable, et une abolition est donc abordable?
Imbs: … Le critĂšre de sentience est un problĂšme parce qu’il dĂ©clenche l’expĂ©rimentation animale,
un problĂšme pour qui, et pourquoi, et par rapport Ă quoi?
Les porcs saignent et on est en train de théoriser concernant les cochenilles, et les plantes⊠pourquoi?
Et l’argument contre l’expĂ©rimentation animale (dans la minoritĂ© de cas oĂč elle risque de sauver les vie) est plus compliquĂ©e que l’argument contre l’exploitation des animaux (sans nĂ©cessitĂ© vitale) pour la viande ou le lait ou la fourrure.
Imbs: et parce que l’Ă©crasante majoritĂ© des animaux ne sont vraisemblablement pas sentients. Il y a un autre problĂšme avec ce critĂšre, c’est qu’il est anthropomorphique.
Quel critĂšre? CritĂšre Ă quoi? Et câest quoi le problĂšme?
Et en ce qui concerne la douleur, la peur et la souffrance, quâest-ce quâil y a Ă reprocher Ă lâanthropomorphisme (autrement dit: lâempathie et la compassion)?
Imbs: Tout en haut de la pyramide, il y a la conscience humaine.
pyramide de quoi?
Imbs: Juste en dessous, il y a la sentience, et en dessous encore, il y a pratiquement tous les organismes vivants.
Je ne vois pas de pyramide dans cette discussion. Juste la souffrance, et le souci de ne pas la causer inutilement.
Imbs: On n’accorde alors d’intĂ©rĂȘt Ă vivre qu’en raison d’une vague ressemblance Ă l’espĂšce humaine.
Je suis perdu. M. Imbs commençait en disant que les plantes souffrent (mais « autrement ») ensuite les invertĂ©brĂ©s ne souffrent pas, faute de preuves scientifiques, et que de tenir compte des donnĂ©es comportementales, neuronales (et Ă©volutives) serait « anthropomorphique » . Quâest ce qui est en jeu?
Imbs: Aucune plante, aucune bactĂ©rie, aucun champignon et aucun insecte n’est capable d’avoir un intĂ©rĂȘt Ă vivre selon ce critĂšre.
IntĂ©rĂȘt ressenti ou « intĂ©rĂȘt » sens adaptatif, voir fonctionnel? (Et jâai perdu le fil: câest quel critĂšre qui est en procĂšs?)
Imbs: C’est une fraude qui place notre espĂšce en haut d’une hiĂ©rarchie imaginaire, avec un systĂšme de valeur artificiel.
Je perd tout maintenant. Qui a commis cette fraude? Je lâentends la premiĂšre fois ici!
(M. Imbs semble ĂȘtre en train de dĂ©fendre une idĂ©ologie Ă©cologiste â conserver les espĂšces â tout Ă fait admirable. Puisquâon parle du vĂ©ganisme, je prĂ©sume quâil invoque cet Ă©cologisme comme une des raisons pour devenir vĂ©gane. Bravo. Câest Ă applaudir. Mais ensuite vient la question des autres raisons pour devenir vĂ©ganes. Et les prioritĂ©s. Et ce qui va convaincre les gens.
Cet écologisme intégriste ne me semble ni suffisant, ni primordial parmi les raisons et les incitatifs pour le véganisme.
Harnad: “3. MĂȘme si les plantes Ă©taient conscientes, les humains nâauraient pas de choix pour survivre que de les consommer; avec les animaux, on a le choix.”
Imbs: Ăa c’est vrai, mais on s’en fiche de la conscience.
??
PrĂ©sumant que par « conscience » ce que M. Imbs a Ă l’esprit c’est sa propre dĂ©finition idiosyncratique de la conscience, alors remplaçons « conscientes » par « sentientes » et je rĂ©pĂšte:
?? On sâen fiche?
Imbs: Tous les organismes sont, par définition, résistants.
Et alors quoi? On parle du ressenti (sentience) pas de la résistance.
Imbs: Ils comptent pour eux-mĂȘmes, qu’ils soient conscients ou non.
Ăa ressemble Ă quoi de compter pour soi-mĂȘme chez les entitĂ©s qui nâont pas le ressenti? (Est-ce quâon robot compte pour soi-mĂȘme? un Ă©lectron?)
Imbs: C’est surtout parce qu’on Ă©pargne tous les autres rĂšgnes lorsqu’on ne consomme pas les produits d’origine animale, que l’on doit choisir le vĂ©ganisme.
Une raison de plus. Mais est-ce un souci dâĂ©pargner les Ă©toiles aussi? et les Ă©lectrons?
Câest de la souffrance quâil faut Ă©pargner (dĂ©livrer) en premier lieu. Et câest les ĂȘtres sensibles quâil faut dĂ©livrer.
Imbs: En ne consommant pas les animaux, nous rĂ©duisons considĂ©rablement notre impact sur l’ensemble des rĂšgnes, sur l’ensemble des organismes.
Câest beau, mais si ce nâest pas pour Ă©viter la souffrance des ĂȘtres sensibles, câest quoi la motivation pour Ă©pargner les « rĂšgnes » ? (Câest quoi un rĂšgne? Une espĂšce?)
Imbs: Voilà une façon de penser qui est rationnelle, et qui ne prétend pas que la conscience humaine est sacrée.
Qui prĂ©tend que la conscience humaine est sacrĂ©e? Le seul principe est quâil est mal de causer souffrance aux ĂȘtres sensibles sans nĂ©cessitĂ©. (Câest cette sacrĂ©e conscience humaine qui cause la souffrance aux autres ĂȘtres sentients sans nĂ©cessitĂ©.)
Harnad: “4. Donc invoquer la possibilitĂ© de la conscience et de la souffrance chez les plantes ne va pas seulement Ă lâencontre de toutes les preuves scientifiques, mais ça sert Ă camoufler lâoption morale urgente qui nous est ouverte avec une option qui nâexiste pas.”
Imbs: Faux. Il n’est pas nĂ©cessaire de dĂ©montrer que les plantes ne souffrent pas pour choisir de respecter leur existence, qu’elles soient conscientes ou non.
Jâai perdu le fil encore plus profondĂ©ment. Jâai dit quâil fallait dâabord dĂ©livrer les ĂȘtres sensibles de leur souffrances inutiles. Les plantes (que jâaime beaucoup aussi) ont moins de prioritĂ©, parce que (1) on nâa pas de choix que de les consommer pour survivre et (2) parce quâelles ne sont pas sentientes.
Oui, il y a les considĂ©rations Ă©cologiques aussi. Mais Ă part de celles qui concernent Ă©galement les souffrances inutiles des ĂȘtres sensibles, ces considĂ©rations sont Ă©galement pas prioritaires.
Imbs: Un organisme vivant est un organisme vivant, peu importe.
Non. Câest profondĂ©ment diffĂ©rent et important sâil est sentient.
Imbs: Nous ne pouvons faire que de notre mieux, c’est-Ă -dire commencer par ne plus consommer de produits d’origine animale, ce qui rĂ©duit notre impact sur les autres rĂšgnes de maniĂšre considĂ©rable.
Surtout ceux sur les victimes sentientes quâon consomme sans nĂ©cessitĂ© actuellement.
Harnad: “5. La souffrance que nous infligeons aux animaux est rĂ©elle, monstrueuse et Ă©vitable; arrĂȘtons de la justifier avec ce qui est inĂ©vitable.”
Imbs: Faux encore. Des mĂ©thodes d’Ă©levage de transport et d’abattage existent et se dĂ©veloppent en raison de revendications doloristes et sentientistes. Ce n’est qu’une question technique pour les zootechniciens.
Je nâai rien compris dans ça.
Je viens dâapprendre que je suis « doloriste » et « sentientiste » ! Jâaccepte!
Mais alors je suis « doloriste » et « sentientiste » envers les victimes du Holocaust aussi. Est-ce que je devrai me justifier en termes dâimpacte « sur les rĂšgnes » lĂ aussi?
Je suis fortement opposĂ© aux querelles intestines entre les activistes vĂ©ganes. On est dĂ©jĂ beaucoup trop peu nombreux et les victimes ont beaucoup trop besoin de nous. Je souhaite tout succĂšs Ă M. Imbs — mais aussi beaucoup de rĂ©flexion.