The “Sight” in Insight

Anonymous: “Did ChatGPT itself ever state a significant, “insightful” idea during your “Language Writ Large” dialogue?

Did GPT provide a significant new insight? It’s very hard to say, because I cannot tell whether it said anything that didn’t come from its enormous database of the words of others. Of course, a lot of human insights do come from recombining the words of others — recombination is part of creative work, both literary and scientific. (Hadamard and others thought that such recombination was part of scientific creativity too.). And it occurs in nonverbal areas like music too (though we may not speak of this as “insight.”)

I think most of what GPT does is recombination and compressive synthesis of the words of others; and, if what it says is new to me, that doesn’t mean it’s new, or original, “from” GPT. But it doesn’t mean it isn’t either. 

I expect that what you might have in mind with your question is something related to embodiment, situatedness, sensorimotor grounding. 

The AI/transformer community thinks that if anything requiring those is missing so far, it will be provided by “multimodal” grounding.  But I tried to suggest in Writ Large why I didn’t think that that would be enough: Language is not just another one of the sensorimotor modalities, whether it is spoken or written. It is not an input or output modality but a way of producing, transmitting and receiving propositional thought. That thought is grounded in sensorimotor experience – but it is not itself sensorimotor experience; it is a verbal expression of it. A (grounded) code for expressing and communicating thought.

Chomsky thought – or once thought – that verbal thought was the only form of thought. That was of course wrong. Nonverbal animals can think, deliberate, plan, communicate, understand, reflect, ruminate. We humans can express their thoughts, but this is partly misleading, because although the sensorimotor basis of it is there in animals’ thinking too, it is not propositional: they cannot do what we can do in words (though I don’t doubt that nonhuman animal thinking is combinatorial too).

But GPT cannot do what animals are doing at all, when they are thinking. And our own thinking capacity is based on the sensorimotor capacity and experience that we share with other thinking species, including even the most primitive ones. Animals can have insights; GPT can’t. Not necessarily because GPT is not a living organism (though that could turn out to be the reason too). I think that if a sensorimotor Turing robot had the capacity to do and say anything a human could, indistinguishably from any other human, to any other human, for a lifetime, then it would be grounded too — as well as sentient: able to feel. 

But I think you can’t get to such a Turing-scale robot top-down, from an LLM, just by adding on sensorimotor “modalities”. I think the only way to get there is bottom up, robotically, just as we animals do it. (This is what’s behind – or underneath â€“ the fundamental asymmetry between direct sensorimotor grounding and indirect verbal grounding I mentioned in Writ Large.)

But I think I’ve drifted off on my own ruminations. I would certainly agree that “insight,” whether verbal or nonverbal, must be felt, and that feeling is a sensorimotor capacity, both in nonhuman animals and in human ones (and perhaps in Turing-scale sensorimotor robots, if they are possible). And that GPT can only talk the talk (the recombined talk of others) and not walk the walk, which is sensorimotor, felt, and based on feeling, not just optical, acoustic, and ambulatory.

But I have no idea why sensorimotor activity has to be felt: That’s the “hard problem.”

Créativité : méthode ou magie ?

Stevan Harnad

Harnad, S. (2006). Creativity: Method or magic?. Hungarian Studies20(1), 163-177.

RĂ©sumĂ© : La crĂ©ativitĂ© peut ĂȘtre un trait, un Ă©tat ou simplement un processus dĂ©fini par ses produits. Cela peut ĂȘtre comparĂ© Ă  certaines activitĂ©s cognitives qui ne sont gĂ©nĂ©ralement pas crĂ©atives, telles que la rĂ©solution de problĂšmes, la dĂ©duction, l’induction, l’apprentissage, l’imitation, les essais et erreurs, l’heuristique et « l’enlĂšvement », mais toutes ces activitĂ©s peuvent Ă©galement ĂȘtre rĂ©alisĂ©es de maniĂšre crĂ©ative. . Il existe quatre types de thĂ©ories, attribuant la crĂ©ativitĂ© respectivement Ă  (1) la mĂ©thode, (2) la « mĂ©moire » (structure innĂ©e), (3) la magie ou (4) la mutation. Ces thĂ©ories mettent diversement l’accent sur le rĂŽle de l’inconscient, les contraintes innĂ©es, l’analogie, l’esthĂ©tique, les anomalies, les contraintes formelles, le hasard, les analogues mentaux, les stratĂ©gies heuristiques, la performance improvisĂ©e et la collaboration cumulative. Il y a une part de vertu dans chacun d’entre eux, mais le meilleur modĂšle reste celui implicite dans le dicton de Pasteur : « Le hasard favorise les esprits prĂ©parĂ©s ». Et comme l’exercice et mĂȘme la dĂ©finition de la crĂ©ativitĂ© nĂ©cessitent des contraintes, il est peu probable que la « formation Ă  la crĂ©ativitĂ© » ou l’accent mis sur la libertĂ© dans l’Ă©ducation puissent jouer un rĂŽle productif dans cette prĂ©paration. 


Qu’est-ce que la « crĂ©ativitĂ© » ? Est-ce un trait cognitif stable que certaines personnes possĂšdent et d’autres non ? Est-ce un Ă©tat occasionnel dans lequel les gens entrent parfois ? Ou est-elle dĂ©finie entiĂšrement par ses produits : « la crĂ©ativitĂ© est comme la crĂ©ativitĂ© » ? Quoi qu’il en soit, comment naĂźt la crĂ©ativitĂ© ? Comment faites-vous? Y a-t-il des rĂšgles ? La pratique vous aidera-t-elle Ă  devenir crĂ©atif ?

Il y a probablement une part de vĂ©ritĂ© dans ces trois notions de ce qu’est la crĂ©ativitĂ©. C’est (au moins parfois, et dans une certaine mesure) un trait, car c’est un fait statistique que certains individus le prĂ©sentent Ă  plusieurs reprises. Cela peut Ă©galement ĂȘtre corrĂ©lĂ© Ă  d’autres traits ; certains pensent mĂȘme que cela peut ĂȘtre prĂ©dit par des tests psychologiques objectifs. Mais c’est aussi Ă©videmment un Ă©tat, car personne n’est crĂ©atif tout le temps, et certaines personnes ne sont hautement crĂ©atives qu’une seule fois dans leur vie. Parfois, la crĂ©ativitĂ© n’est mĂȘme pas un Ă©tat spĂ©cial et unique, mais plutĂŽt une circonstance dĂ©finie rĂ©trospectivement, basĂ©e sur quelque chose d’extĂ©rieur, quelque chose de crĂ©atif qu’un individu a fait.

Il existe un certain nombre de thĂ©ories sur les mĂ©canismes sous-jacents de la crĂ©ativitĂ©, thĂ©ories l’attribuant Ă  tout, depuis la mĂ©thode jusqu’à la folie – aucune d’entre elles n’est trĂšs satisfaisante. Quant Ă  stimuler la crĂ©ativitĂ© – en utilisant des stratĂ©gies heuristiques ou par une « formation Ă  la crĂ©ativitĂ© » – cela a eu un succĂšs trĂšs limitĂ©.

Le dicton de Pasteur. Avant de passer Ă  une discussion sur les mĂ©canismes et les mĂ©thodes de crĂ©ativitĂ©, nous ferions bien de garder Ă  l’esprit le cĂ©lĂšbre dicton de Pasteur, «… le hasard favorise l’esprit prĂ©parer», car cela entraĂźnera s’avĂšrent en dire plus sur ce que l’on peut dire sur la crĂ©ativitĂ© que les notions plus ambitieuses ou plus modernes. Pasteur parlait bien entendu d’un type de crĂ©ativitĂ© trĂšs spĂ©cifique, Ă  savoir la crĂ©ativitĂ© scientifique expĂ©rimentale. (La citation commence en fait : < > — “Dans les domaines expĂ©rimentaux” ou “Dans les domaines de l’expĂ©rimentation”, et s’intĂ©ressait en partie Ă  la question de savoir si les dĂ©couvertes expĂ©rimentales — celles que l’on appelle « fortuites » — ne sont en rĂ©alitĂ© que des accidents heureux.) Pasteur La perspicacitĂ© semble cependant s’appliquer tout aussi bien Ă  toutes les formes de crĂ©ativitĂ©.

On peut interprĂ©ter le dicton de Pasteur comme suit : il y a une part (peut-ĂȘtre trĂšs importante) de hasard dans la crĂ©ativitĂ©, mais elle a plus de chances de se produire si l’esprit y est prĂ©parĂ© d’une maniĂšre ou d’une autre. Le contexte montre que par « prĂ©paration », Pasteur n’entendait pas naĂźtre avec le trait « crĂ©atif ». Il voulait dire que les connaissances et les compĂ©tences existantes pertinentes pour le « saut » crĂ©atif devaient d’abord ĂȘtre suffisamment maĂźtrisĂ©es avant qu’un « coup de tonnerre » ne soit probable. Paradoxalement, sa suggestion est que la seule formule de crĂ©ativitĂ© est la moins crĂ©ative imaginable, Ă  savoir apprendre ce qui est dĂ©jĂ  connu. Ce n’est qu’à ce moment-lĂ  que vous disposerez de suffisamment de matiĂšres premiĂšres nĂ©cessaires pour une contribution originale et que vous serez alors en mesure de reconnaĂźtre quelque chose de valable et d’original pour ce qu’il est rĂ©ellement.

Certaines notions floues se sont glissĂ©es dans cette histoire : « originalitĂ© », « valeur », « sauts crĂ©atifs » et « coup de tonnerre ». Il est clair que la crĂ©ativitĂ© a quelque chose Ă  voir avec l’originalitĂ© et la nouveautĂ©, mais il est tout aussi clair qu’elle ne peut pas simplement ĂȘtre Ă©quivalente Ă  quelque chose de nouveau, car tant de choses nouvelles sont alĂ©atoires, triviales ou sans intĂ©rĂȘt. Cela aussi a Ă  voir avec la « prĂ©paration ». Il est peu probable qu’un remĂšde contre le cancer (pour prendre un exemple mythique) soit dĂ©couvert par quelqu’un qui n’a pas fait ses devoirs sur ce que l’on sait dĂ©jĂ  sur le cancer. Il peut en effet proposer de « nouvelles » hypothĂšses auxquelles personne n’a jamais pensĂ©, mais il sera Ă©vident pour les esprits « prĂ©parĂ©s » du domaine qu’une telle hypothĂšse non Ă©tudiĂ©e est simpliste, absurde ou abandonnĂ©e depuis longtemps (comme il le dit). est trĂšs probable — bien que cela ne soit pas, bien sĂ»r, logiquement certain — qu’il en soit ainsi).

La nouveautĂ© ne suffit donc pas. Quelque chose de crĂ©atif doit Ă©galement avoir une certaine valeur par rapport Ă  ce qui existe dĂ©jĂ  et Ă  ce qui est perçu comme nĂ©cessaire. (Notez que ceci, et toute la discussion prĂ©cĂ©dente, se concentre sur ce que l’on pourrait appeler la crĂ©ativitĂ© « intellectuelle », « technologique » ou « pratique », alors qu’il existe, bien sĂ»r, une autre dimension de la valeur qui n’a pas grand-chose Ă  voir avec l’aspect pratique et peut-ĂȘtre cela n’a plus grand chose Ă  voir avec l’intellectualitĂ©, et c’est lĂ  la crĂ©ativitĂ© artistique. Ici un des critĂšres de valeur est la valeur esthĂ©tique, un critĂšre affectif ou Ă©motionnel qui finira par resurgir de maniĂšre inattendue mĂȘme dans la crĂ©ativitĂ© intellectuelle. Nous y reviendrons plus loin, mais (Pour l’instant, notons que les considĂ©rations intellectuelles et pratiques ne sont pas les seules bases pour porter des jugements de valeur.)

Et mĂȘme ĂȘtre nouveau et prĂ©cieux ne semble pas suffire : le rĂ©sultat doit Ă©galement ĂȘtre inattendu ; il doit y avoir un sentiment de surprise. Habituellement, cela signifie que cela ne serait pas venu Ă  l’esprit de la plupart des gens, qui tentaient plutĂŽt quelque chose dans le mĂȘme sens sans succĂšs, prĂ©cisĂ©ment parce qu’ils suivaient les attentes conventionnelles – ce que le rĂ©sultat surprenant viole d’une maniĂšre ou d’une autre.

Et ici, avec ce troisiĂšme et dernier critĂšre de « l’inattendu », nous semblons ĂȘtre en contradiction avec le dicton de Pasteur. Car que peut faire toute cette « prĂ©paration », sinon former nos attentes, Ă©tablir des conventions, Ă©voluer dans des directions familiĂšres et sans surprise ? En dĂ©finissant la crĂ©ativitĂ© comme la production de quelque chose qui est non seulement nouveau et prĂ©cieux, mais aussi inattendu, nous semblons avoir mis un handicap insurmontable sur le chemin de la prĂ©paration : car quelle que soit la direction dans laquelle la prĂ©paration nous mĂšne rĂ©ellement, elle ne peut ĂȘtre inattendue. Cela semble en effet paradoxal, mais encore une fois, un examen plus attentif du dicton de Pasteur rĂ©sout l’apparente contradiction : l’idĂ©e n’est pas que la prĂ©paration garantisse la crĂ©ativitĂ©. Rien ne garantit la crĂ©ativitĂ©. Ce que Pasteur veut dire, c’est que la seule maniĂšre de maximiser la probabilitĂ©de crĂ©ativitĂ© est la prĂ©paration. Il a reconnu Ă  juste titre que l’élĂ©ment essentiel reste le hasard – l’imprĂ©vu, l’inattendu – mais que ce facteur fortuit est plus probable dans des conditions prĂ©parĂ©es.

Une fois arrivĂ©s Ă  trois critĂšres (certes vagues) pour dĂ©terminer ce qui est crĂ©atif, nous pourrions peut-ĂȘtre renforcer cette notion en l’opposant Ă  ce qui ne l’est pas. Nous dĂ©couvrirons cependant que, mĂȘme s’il existe de nombreuses activitĂ©s cognitives qui ne sont pas habituellement crĂ©atrices en elles-mĂȘmes, chacune d’entre elles est Ă©galement capable d’ĂȘtre exĂ©cutĂ©e de maniĂšre crĂ©ative, ce qui suggĂšre que la crĂ©ativitĂ© est en quelque sorte complĂ©mentaire Ă  la cognition ordinaire.

Qu’est-ce qui n’est pas crĂ©atif ?

RĂ©solution de problĂšme. En gĂ©nĂ©ral, la rĂ©solution de problĂšmes n’est pas une activitĂ© crĂ©atrice (mĂȘme si Stravinsky pensait que c’était le cas – nous reviendrons sur sa vision et sa dĂ©finition assez diffĂ©rente de la « rĂ©solution de problĂšmes »). La rĂ©solution de problĂšmes implique l’application d’une rĂšgle connue ou d’un « algorithme » afin de rĂ©soudre des problĂšmes d’un type global qui varie de maniĂšre mineure ou prĂ©visible. Bien que certains Ă©lĂ©ments de nouveautĂ© et de prise de dĂ©cision puissent ĂȘtre impliquĂ©s — c’est une erreur de premier cycle, façonnĂ©e par les exigences malheureuses de la passation d’examens, que de penser que la rĂ©solution de problĂšmes peut ĂȘtre accomplie avec succĂšs par cƓur — et la rĂšgle ou la formule pertinente peut nĂ©cessiter un certain temps. Afin d’ĂȘtre comprise et appliquĂ©e, la rĂ©solution appliquĂ©e conventionnelle de problĂšmes est nĂ©anmoins un processus relativement passif et mĂ©canique. Comprendre et appliquer avec succĂšs une rĂšgle n’est tout simplement pas la mĂȘme chose que la dĂ©couvrir. Cependant, comme le montrera notre discussion sur l’analogie ci-dessous, des Ă©tincelles de crĂ©ativitĂ© peuvent ĂȘtre impliquĂ©es mĂȘme dans la reconnaissance du fait qu’une classe de nouveaux problĂšmes peut ĂȘtre rĂ©solue de maniĂšre inattendue par une rĂšgle ancienne. Et mĂȘme dans le contexte de l’enseignement, les Ă©lĂšves douĂ©s peuvent redĂ©couvrir de maniĂšre indĂ©pendante de nouvelles applications d’algorithmes qui leur ont Ă©tĂ© enseignĂ©s Ă  des fins plus limitĂ©es.

DĂ©duction. Le raisonnement dĂ©ductif, qui est dĂ©fini comme le raisonnement Ă  partir de principes gĂ©nĂ©raux vers des cas particuliers (comme en dĂ©duisant des principes selon lesquels « Tous les hommes sont mortels » et « Socrate est un homme » la consĂ©quence que « Socrate est mortel »), n’est en gĂ©nĂ©ral pas crĂ©atif. . D’un autre cĂŽtĂ©, vues d’une certaine maniĂšre, toutes les mathĂ©matiques sont une dĂ©duction logique : il existe des thĂ©orĂšmes pour lesquels il est difficile, voire impossible, de voir intuitivement s’ils sont vrais ou non, et encore moins de prouver qu’ils sont vrais en montrant les Ă©tapes par lesquelles ils peuvent ĂȘtre dĂ©duits de principes gĂ©nĂ©raux. Par consĂ©quent, toutes les dĂ©ductions ne sont pas triviales ; certains pourraient bien nĂ©cessiter une formidable crĂ©ativitĂ© pour ĂȘtre rĂ©alisĂ©s. En gĂ©nĂ©ral, c’est l’ampleur de l’Ă©cart dĂ©ductif entre les principes et leurs consĂ©quences qui dĂ©termine si la dĂ©duction nĂ©cessite ou non de la crĂ©ativitĂ© : « Socrate est mortel » n’en a pas besoin ; Le dernier thĂ©orĂšme de Fermat le fait.

Induction. Le raisonnement inductif, qui est dĂ©fini comme un « raisonnement » Ă  partir de cas particuliers vers des principes gĂ©nĂ©raux, n’est pas non plus, en gĂ©nĂ©ral, crĂ©atif, mais il est plus problĂ©matique, pour des raisons intĂ©ressantes. Car alors que dans le raisonnement dĂ©ductif, une fois que la vĂ©ritĂ© d’un thĂ©orĂšme est connue et que la preuve a Ă©tĂ© construite, le chemin des principes aux consĂ©quences peut ĂȘtre parcouru de maniĂšre relativement mĂ©canique, dans le raisonnement inductif, il ne semble y avoir aucun chemin mĂ©canique disponible autre que les essais et les erreurs ; et ce chemin, dans les cas les plus intĂ©ressants, peut s’avĂ©rer soit alĂ©atoire, soit sans fin (ou les deux). Ainsi, des gĂ©nĂ©ralisations inductives qui ne sont pas triviales (Ă  la maniĂšre de « telle pomme est ronde, telle pomme est ronde, donc toutes les pommes sont rondes » est trivial) appellent Ă  la crĂ©ativitĂ©. Et mĂȘme lorsque le principe gĂ©nĂ©ral est trouvĂ©, il n’y a pas de chemin “a posteriori” que l’on puisse reconstruire a posteriori (comme on peut le faire aprĂšs avoir dĂ©couvert une preuve dĂ©ductive) pour conduire du particulier au gĂ©nĂ©ral — seulement l’inverse. .

En d’autres termes, il ne semble pas y avoir d’algorithme ou de rĂšgle gĂ©nĂ©rale pour effectuer un raisonnement inductif. Ainsi, alors que la plupart des inductions quotidiennes sont trĂšs graduelles, triviales et non crĂ©atives, les cas les plus substantiels de « raisonnement » inductif ne sont probablement pas du tout un raisonnement, mais une crĂ©ativitĂ© en action. Notez cependant que, puisque l’ampleur du « fossĂ© » qui sĂ©pare le conventionnel du crĂ©atif est dans une certaine mesure arbitraire (et qu’il est peu probable que nos capacitĂ©s cognitives de base aient Ă©voluĂ© au service d’Ă©vĂ©nements rares et cĂ©lĂ©brĂ©s), mĂȘme « le quotidien » “l’induction” peut prĂ©senter de vĂ©ritables Ă©lĂ©ments de crĂ©ativitĂ© qui n’atteindront jamais la cĂ©lĂ©britĂ©.

Apprentissage. Bien que, comme pour toutes les compĂ©tences, certaines personnes y parviennent mieux et de maniĂšre plus impressionnante que d’autres, l’apprentissage n’est en gĂ©nĂ©ral pas non plus une activitĂ© crĂ©ative : il s’agit de l’acquisition de connaissances et de compĂ©tences par l’instruction et l’exemple. De par sa nature, ce n’est pas quelque chose qui peut donner naissance Ă  quelque chose de nouveau et d’inattendu, mĂȘme s’il y a parfois des surprises, avec des Ă©tudiants crĂ©atifs dĂ©couvrant (ou, tout aussi important par rapport Ă  ce qu’ils savent dĂ©jĂ  et ce qu’ils ne savent pas : redĂ©couvrir ) des choses qui vont bien au-delĂ  du contenu immĂ©diat de ce qui leur est enseignĂ©.

Imitation. Par dĂ©finition, l’imitation donne naissance Ă  quelque chose qui n’est pas nouveau ; ce n’est donc en gĂ©nĂ©ral pas non plus une activitĂ© crĂ©atrice. Et pourtant, il s’avĂšre Ă©galement ĂȘtre un prĂ©curseur important de la crĂ©ativitĂ©, notamment artistique. Ceux qui finissent par devenir des innovateurs crĂ©atifs commencent souvent par imiter les autres de maniĂšre remarquablement astucieuse. L’imitation est Ă©galement liĂ©e Ă  d’autres facteurs importants dans la crĂ©ativitĂ©, tels que l’analogie, la mĂ©taphore et la « mimesis » (une thĂ©orie grecque selon laquelle l’art imite la nature). Invariablement, le nouveau et le prĂ©cieux ressemble Ă  l’ancien d’une maniĂšre (peut-ĂȘtre inattendue).

Essai et erreur. Presque par dĂ©finition, les essais et erreurs ne sont pas crĂ©atifs et impliquent un Ă©chantillonnage alĂ©atoire plutĂŽt qu’un choix inspirĂ©. Mais il ne faut pas oublier le rĂŽle du hasard dans la crĂ©ativitĂ©. Le « hasard » fait spĂ©cifiquement rĂ©fĂ©rence Ă  des rĂ©sultats surprenants, nouveaux et prĂ©cieux, survenant purement par hasard, et donc potentiellement issus de rien d’autre que des essais et des erreurs alĂ©atoires. Des enseignements peuvent ĂȘtre obtenus en examinant un panorama de cas individuels. NĂ©anmoins, les essais et erreurs alĂ©atoires (ou « tĂątonner et trouver ») sont gĂ©nĂ©ralement le symptĂŽme d’une approche particuliĂšrement peu crĂ©ative. Pourtant, une exception majeure semble ĂȘtre le processus d’Ă©volution biologique (que certains ont mĂȘme dĂ©crit avec admiration comme « crĂ©atif ») : l’Ă©volution a produit ses rĂ©sultats remarquables avec ce qui, selon la meilleure thĂ©orie actuelle, n’est guĂšre plus qu’une variation gĂ©nĂ©tique alĂ©atoire, qui est puis façonnĂ© de maniĂšre sĂ©lective par ses consĂ©quences adaptatives pour la survie et la reproduction. Des processus similaires (gĂ©nĂ©ralement non crĂ©atifs) sont impliquĂ©s dans la formation du comportement par ses consĂ©quences immĂ©diates dans l’apprentissage par essais et erreurs (« opĂ©rant » ou « skinnĂ©rien »).

Heuristique. Les heuristiques sont gĂ©nĂ©ralement comparĂ©es aux « algorithmes » dans la rĂ©solution de problĂšmes. La rĂ©solution d’un problĂšme Ă  l’aide d’un algorithme ou d’une rĂšgle de sĂ©curitĂ© est censĂ©e donner une solution exacte et fiable qui fonctionne dans chaque cas. Le « rĂ©soudre » par des heuristiques – par un ensemble non intĂ©grĂ© et incomplet de « rĂšgles empiriques » suggestives qui fonctionnent dans certains cas, mais pas dans tous, et pas pour des raisons entiĂšrement comprises ou unifiĂ©es – est tout aussi peu crĂ©atif que de le rĂ©soudre en algorithme. Cependant, de nombreuses personnes ont remarquĂ© que les procĂ©dures heuristiques (telles que l’Ă©chantillonnage de nombreux cas particuliers par essais et erreurs) conduisent parfois Ă  des idĂ©es, parfois par gĂ©nĂ©ralisation inductive et analogie avec des cas dans lesquels les heuristiques rĂ©ussissent, et parfois en raison du stimulus fourni par les cas. dans lequel les heuristiques (ou mĂȘme les algorithmes) Ă©chouent (voir la discussion sur les anomalies ci-dessous).

EnlĂšvement. Peirce a proposĂ© qu’outre l’induction et la dĂ©duction, il existe un troisiĂšme processus, appelĂ© « enlĂšvement », par lequel les gens trouvent la bonne gĂ©nĂ©ralisation en considĂ©rant des exemples de cas, mĂȘme si la probabilitĂ© d’y parvenir est beaucoup trop faible. Puisque ce processus est hypothĂ©tique, il n’appartient pas vraiment Ă  cette liste de choses que nous faisons rĂ©ellement et qui ne sont (gĂ©nĂ©ralement) pas crĂ©atives. Cependant, le reste de l’hypothĂšse renvoie Ă  un thĂšme qui reviendra lorsque nous discuterons des mĂ©canismes possibles de crĂ©ativitĂ©. Peirce pensait que la raison pour laquelle nous parvenons si souvent Ă  trouver des gĂ©nĂ©ralisations improbables est que les solutions sont dĂ©jĂ  intĂ©grĂ©es dans notre cerveau. Par consĂ©quent, selon ce point de vue, la crĂ©ativitĂ© est une sorte de « souvenir Â», un peu comme Platon pensait qu’apprendre Ă©tait un souvenir [anamnĂšse] (et non un souvenir conscient dans les deux cas, bien sĂ»r). S’il est vrai que les schĂ©mas innĂ©s de notre activitĂ© cĂ©rĂ©brale jouent un rĂŽle crucial dans la crĂ©ativitĂ©, alors bien sĂ»r aucune « prĂ©paration » n’est plus importante que celle-ci (Ă©volutive ?), et la crĂ©ativitĂ© s’avĂšre ĂȘtre en partie une compĂ©tence instinctive.

Ainsi se termine la liste (partielle) des cas suggestifs de ce qui n’est habituellement pas une activitĂ© crĂ©atrice. Je vais maintenant discuter briĂšvement de la question « Ă©tat contre trait Â» avant de passer Ă  l’examen du « processus crĂ©atif Â» et des « mĂ©canismes Â» possibles de la crĂ©ativitĂ©.

Trait créatif ou état créatif ?

Il y a actuellement un dĂ©bat considĂ©rable sur la question de savoir si l’intelligence est un trait unitaire ou pluriel, c’est-Ă -dire s’il y a une intelligence ou y en a-t-il plusieurs ? Quelle que soit la vĂ©ritĂ©, il est clair qu’une sorte de « prĂ©paration » (et non celle prĂ©vue par Pasteur) dont un esprit aspirant Ă  ĂȘtre crĂ©atif (au moins intellectuellement) pourrait bĂ©nĂ©ficier serait un QI Ă©levĂ© (ou des QI, s’il y en a). beaucoup). La question de savoir si le QI lui-mĂȘme est un trait hĂ©ritĂ© ou un « Ă©tat » acquis est une question trop complexe pour ĂȘtre discutĂ©e ici (il s’agit probablement des deux), mais notez que la question unitaire/pluriel s’applique Ă©galement Ă  la crĂ©ativitĂ©. Qu’il s’agisse d’un trait ou d’un Ă©tat, la crĂ©ativitĂ© peut ĂȘtre universelle ou spĂ©cifique Ă  un domaine, les individus la manifestant pour certains types de problĂšmes et pas pour d’autres. La distinction entre crĂ©ativitĂ© intellectuelle et crĂ©ativitĂ© artistique en est elle-mĂȘme un bon exemple (voir la discussion sur les arts du spectacle ci-dessous).

La façon dont fonctionnent les tests de QI est que nous sĂ©lectionnons, dans le monde rĂ©el, l’activitĂ© ou la compĂ©tence humaine (appelĂ©e « critĂšre Â») que nous considĂ©rons comme intelligente (par exemple, faire des mathĂ©matiques), puis nous concevons des tests qui sont fortement corrĂ©lĂ©s aux diffĂ©rences individuelles dans ce critĂšre d’activitĂ©, les scores Ă©levĂ©s prĂ©disent un niveau de performance Ă©levĂ© et les scores faibles prĂ©disent un niveau faible. C’est ainsi que les tests de QI sont validĂ©s statistiquement. Essayer de faire de mĂȘme avec les « tests de crĂ©ativitĂ© Â» pose cependant immĂ©diatement des problĂšmes, tant le critĂšre « compĂ©tence Â» est rare, diversifiĂ© et difficile Ă  dĂ©finir. Des tests de « crĂ©ativitĂ© » dits de « pensĂ©e divergente » ont Ă©tĂ© construits sans aucune validation solide. Ils diffĂšrent des tests d’intelligence « convergents » en ce sens qu’ils sont ouverts et n’ont pas de rĂ©ponse strictement correcte. Ils sont censĂ©s prĂ©dire la crĂ©ativitĂ©, mais les problĂšmes de validation semblent insurmontables, car une grande partie de la dĂ©finition du « don » et du « gĂ©nie » est post hoc, basĂ©e sur le recul de cas rares et de rĂ©alisations uniques. Il semble y avoir une contradiction entre le caractĂšre prĂ©dictif des tests objectifs et l’élĂ©ment imprĂ©visible de la crĂ©ativitĂ©. Cependant, s’il existe un trait (gĂ©nĂ©ral ou spĂ©cifique Ă  un problĂšme) de « tendance Ă  faire des choses de valeur imprĂ©visibles », alors les tests pourraient vraisemblablement mesurer ses corrĂ©lats, s’il y en a.

Il existe Ă©galement beaucoup de confusion et de chevauchements dans la mesure des compĂ©tences intellectuelles gĂ©nĂ©rales et spĂ©ciales, et aucune idĂ©e claire sur la maniĂšre dont elles peuvent interagir dans la crĂ©ativitĂ©. Les effets du cycle de vie posent Ă©galement des problĂšmes : les compĂ©tences et les connaissances liĂ©es au QI augmentent avec l’Ăąge jusqu’Ă  l’Ăąge adulte, tandis que la crĂ©ativitĂ© apparaĂźt Ă  diffĂ©rents Ăąges et Ă  diffĂ©rents stades, parfois tĂŽt (comme chez les mathĂ©maticiens), parfois tard (comme chez les Ă©crivains).

En gĂ©nĂ©ral, l’image que nous nous faisons de la crĂ©ativitĂ© basĂ©e sur la mesure objective des diffĂ©rences individuelles n’est pas trĂšs informative, laissant ouverte la possibilitĂ© trĂšs rĂ©elle que, sauf lorsqu’elle dĂ©pend fortement d’une compĂ©tence intellectuelle particuliĂšre (non crĂ©ative), il n’y ait aucun trait mesurable. correspondant Ă  la crĂ©ativitĂ© du tout. Nous nous tournons maintenant vers la crĂ©ativitĂ© en tant qu’Ă©tat ou processus.

MĂ©canismes sous-jacents

Il existe quatre classes de thĂ©ories sur les mĂ©canismes sous-jacents de la crĂ©ativitĂ©. Ils peuvent ĂȘtre classĂ©s (relativement mnĂ©moniquement) comme : (1) mĂ©thode , (2) mĂ©moire , (3) magie et (4) mutation . Le point de vue de la « mĂ©thode » est qu’il existe une formule pour la crĂ©ativitĂ© (cela n’est gĂ©nĂ©ralement pas revendiquĂ© de maniĂšre aussi grossiĂšre). Le point de vue de la « mĂ©moire Â» est que le facteur essentiel est en quelque sorte innĂ©. La vision « magique » est que des forces mystĂ©rieuses, inconscientes et inexplicables sont impliquĂ©es. Et le point de vue de la « mutation » est que l’élĂ©ment essentiel est le hasard. ConsidĂ©rons maintenant plusieurs thĂ©ories candidates en fonction de ces quatre catĂ©gories :

L’inconscient. La crĂ©ativitĂ© en tant que fonctionnement de « l’esprit inconscient » appartient Ă  la classe des thĂ©ories « magiques » (telles que l’inspiration divine). Il n’offre aucune vĂ©ritable explication du processus crĂ©atif, l’attribuant simplement Ă  un inconscient mystĂ©rieux (et trĂšs crĂ©atif). Cette idĂ©e est reprise par Hadamard et d’autres dans son livre sur l’invention mathĂ©matique et est, bien entendu, trĂšs influencĂ©e par les idĂ©es freudiennes dominantes Ă  l’époque. Le scĂ©nario est que pendant un certain temps, on travaille consciemment sur un problĂšme, et quand on Ă©choue, notre esprit inconscient continue et accomplit mystĂ©rieusement ce que l’esprit conscient ne pouvait pas. Du point de vue des sciences cognitives modernes, cela n’est pas trĂšs utile, car tous les processus cognitifs sont inconscients et, en tant que tels, nĂ©cessitent une explication , et pas seulement une attribution anthropomorphique Ă  un autre, plus sage (ou plus primitif), tous analogues au conscient.

Le problĂšme de l’explication de la cognition crĂ©ative et non crĂ©ative consiste Ă  fournir un mĂ©canisme pour l’ensemble de nos processus inconscients. Le seul aspect informatif du modĂšle de « l’inconscient » est l’attention qu’il attire sur le rĂŽle incomplet des efforts conscients et dĂ©libĂ©rĂ©s dans le processus crĂ©atif. Notons cependant que le dicton de Pasteur indiquait dĂ©jĂ  que la prĂ©paration Ă©tait nĂ©cessaire mais pas suffisante. (De plus, « un effort conscient et dĂ©libĂ©rĂ© » n’est mĂȘme pas suffisant pour expliquer des activitĂ©s cognitives aussi peu crĂ©atives que se souvenir d’un nom, reconnaĂźtre un visage ou additionner deux et deux.)

Structure innĂ©e de l’esprit. Le concept dĂ©jĂ  dĂ©crit comme « enlĂšvement » vient d’une thĂ©orie de la « mĂ©moire » (anamnĂšse) selon laquelle la crĂ©ativitĂ© est en quelque sorte guidĂ©e ou contrainte par la structure innĂ©e de l’esprit. (Il existe une thĂ©orie Ă©quivalente de l’Ă©volution biologique, le « prĂ©formationnisme », selon laquelle la structure Ă©voluĂ©e n’est pas façonnĂ©e par le hasard et par essais et erreurs, mais est dĂ©jĂ  inhĂ©rente Ă  la structure de la matiĂšre.) Cette contrainte structurelle peut prendre deux formes. prendre. Soit cela fonctionne en Ă©liminant bon nombre des faux dĂ©parts possibles que nous pourrions prendre en les rendant (littĂ©ralement) impensables en premier lieu, soit cela nous guide d’une maniĂšre ou d’une autre dans la façon dont nous sĂ©lectionnons et Ă©valuons les possibilitĂ©s. Notez que cette thĂ©orie semble Ă  premiĂšre vue s’appliquer plus naturellement Ă  la crĂ©ativitĂ© intellectuelle, oĂč il existe vraisemblablement un « bien » ou un « mal », plutĂŽt qu’Ă  la crĂ©ativitĂ© artistique ; mais bien sĂ»r, dans la crĂ©ativitĂ© artistique, oĂč prĂ©dominent les critĂšres esthĂ©tiques (affectifs et perceptuels), il est facile de voir comment le « bien » et le « mal » peuvent dĂ©pendre de nos organes sensoriels et de notre structure Ă©motionnelle. (Le rĂŽle possible des contraintes esthĂ©tiques mĂȘme dans la crĂ©ativitĂ© intellectuelle sera repris ci-dessous.)

Le problĂšme avec la vision de l’abduction est qu’elle semble attribuer trop de structure innĂ©e spĂ©cifique Ă  l’esprit (et Ă  cet Ă©gard, elle a un Ă©lĂ©ment de la vision magique). Puisque le langage, la logique et l’échantillonnage mĂ©canique des variations possibles par essais et erreurs semblent nous permettre de concevoir tant de choses, il est difficile de voir comment la premiĂšre forme d’enlĂšvement – ​​les limites de ce qui est concevable – pourrait avoir une grande importance. rĂŽle. Le problĂšme de la crĂ©ativitĂ© semble commencer une fois que nous prenons pour acquis le vaste Ă©ventail d’alternatives imaginables : comment pouvons-nous alors trouver les « bonnes Â» ?

La deuxiĂšme forme d’enlĂšvement – ​​l’orientation sĂ©lective – est peut-ĂȘtre plus prometteuse et sera discutĂ©e Ă  nouveau ci-dessous, mais pour l’instant il convient de noter qu’il n’est pas clair dans quelle mesure cette fonction d’« orientation », celle impliquĂ©e dans les intuitions, les conjectures , intuitions, etc. (quels qu’ils soient), est un phĂ©nomĂšne innĂ© et Ă©volutif, dĂ©coulant de la structure de notre esprit, plutĂŽt que d’un effet de l’expĂ©rience, de la prĂ©paration, de l’analogie et mĂȘme du hasard. Le point de vue de l’abduction semble attribuer trop de choses Ă  la structure innĂ©e sans donner aucune explication sur sa nature et ses origines.

Analogie. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un modĂšle complet du processus crĂ©atif, la vision mettant l’accent sur la pensĂ©e analogique est clairement une question de mĂ©thode. L’idĂ©e est que les analogies jouent un rĂŽle important dans le processus crĂ©atif ; que souvent une nouvelle « solution » (ou, dans le cas artistique, une nouvelle innovation) sera basĂ©e sur une analogie fĂ©conde et jusqu’alors inaperçue avec une solution existante dans un autre domaine (Hesse, Black). Cela dĂ©pend dans une large mesure de notre capacitĂ© et de notre inclination Ă  rechercher, trouver et apprĂ©cier les similitudes structurelles, fonctionnelles et formelles. Cela pourrait trĂšs bien impliquer un processus cognitif de base, liĂ© Ă  la maniĂšre dont nos connaissances sont reprĂ©sentĂ©es et manipulĂ©es.

Il existe une forme plus Ă©laborĂ©e de thĂ©orie de l’analogie, la thĂ©orie de la « mĂ©taphore », qui s’applique non seulement Ă  la crĂ©ation poĂ©tique, mais Ă  la crĂ©ativitĂ© en gĂ©nĂ©ral. Dans la mesure oĂč cette thĂ©orie n’est pas elle-mĂȘme simplement mĂ©taphorique, elle est instructive sur la productivitĂ© surprenante de la stratĂ©gie consistant Ă  trouver, voire Ă  imposer des similitudes en juxtaposant des objets, des images ou des idĂ©es, puis, en un sens, Ă  « lire » ou Ă  interprĂ©ter les consĂ©quences. de la juxtaposition (Harnad). Il ne s’agit cependant pas d’une stratĂ©gie infaillible, pas plus que ne le sont l’induction systĂ©matique ou les essais et erreurs alĂ©atoires, car il existe bien plus d’analogies stĂ©riles et vides de sens que d’analogies « crĂ©atives ». Les options sont toutefois rĂ©duites par la prĂ©paration (et peut-ĂȘtre par l’enlĂšvement) et, avec l’aide du hasard, l’analogie – Ă  la fois dĂ©libĂ©rĂ©e et accidentelle – joue un rĂŽle indĂ©niable dans la crĂ©ativitĂ©.

PrĂ©paration. Il faut ici Ă©voquer la « mĂ©thode » pasteurienne elle-mĂȘme, celle de la prĂ©paration. Les rĂ©sultats crĂ©atifs ont tendance Ă  ĂȘtre de nouvelles recombinaisons d’élĂ©ments existants, qui doivent donc tous ĂȘtre rendus facilement disponibles Ă  l’avance par prĂ©paration. La probabilitĂ© de gĂ©nĂ©rer et de reconnaĂźtre un rĂ©sultat nouveau et prĂ©cieux dĂ©pend d’une maĂźtrise suffisante de ce qui est dĂ©jĂ  disponible. Aucune stratĂ©gie plus sĂ»re ne peut ĂȘtre recommandĂ©e Ă  quiconque aspire Ă  apporter une contribution crĂ©ative dans n’importe quel domaine que de maĂźtriser aussi complĂštement que possible ce qui est dĂ©jĂ  connu dans ce domaine et d’essayer d’Ă©tendre le cadre de l’intĂ©rieur. C’est certes paradoxal. PremiĂšrement, par dĂ©finition, une contribution crĂ©ative ne viendra pas des mĂ©thodes existantes ni de « l’intĂ©rieur ». DeuxiĂšmement, il y a le problĂšme bien connu de tomber dans un « Ă©tat d’esprit » mental, qui implique de persĂ©vĂ©rer avec les mĂ©thodes existantes par habitude, au dĂ©triment d’en essayer ou mĂȘme d’en remarquer de nouvelles (comme lorsqu’on revient en arriĂšre pour chercher quelque chose que l’on a dĂ©jĂ  dĂ©couvert). perdu au mĂȘme endroit encore et encore) — c’est prĂ©cisĂ©ment ce qu’on pourrait s’attendre Ă  ce qu’un accent excessif sur la prĂ©paration encourage.

Les dĂ©cors conventionnels sont un danger omniprĂ©sent, et il n’existe aucune formule pour les surmonter si ce n’est de garder Ă  l’esprit que la maĂźtrise n’implique pas l’esclavage et que le but ultime est de transcender les conventions, pas d’y succomber : Une attitude d’admiration et de dĂ©vouement envers le les connaissances ou les compĂ©tences que l’on souhaite maĂźtriser ne sont pas incompatibles avec un esprit d’ouverture d’esprit, d’individualitĂ© et mĂȘme un certain scepticisme ; en effet, une capacitĂ© d’imitation prĂ©coce associĂ©e Ă  un Ă©lĂ©ment de rĂ©bellion peut ĂȘtre un indicateur de promesse dans un domaine donnĂ© (mĂȘme si les dons prodigues n’aboutissent parfois Ă  rien). Que la crĂ©ativitĂ© soit un Ă©tat ou un trait, il est clair qu’à connaissances ou compĂ©tences initiales identiques, certaines personnes rĂ©ussissent Ă  apporter des contributions originales tandis que d’autres tombent dans des attitudes infructueuses et persĂ©vĂ©rantes. La seule stratĂ©gie qui reste Ă  recommander est que si des progrĂšs ne sont pas rĂ©alisĂ©s aprĂšs une tentative suffisamment longue et sĂ©rieuse, il faut ĂȘtre prĂȘt Ă  passer Ă  autre chose (temporairement, voire dĂ©finitivement), peut-ĂȘtre dans l’espoir que la crĂ©ativitĂ©, comme l’intelligence, soit plurielle, et on pourra l’exposer dans un autre domaine.

L’observation bien connue selon laquelle les mathĂ©maticiens ont tendance Ă  faire leurs dĂ©couvertes crĂ©atives lorsqu’ils sont trĂšs jeunes peut ĂȘtre due Ă  l’effet « d’ensemble » : cela peut ĂȘtre au point culminant de sa « prĂ©paration » dans ce domaine problĂ©matique le plus Ă©lĂ©gant et le plus technique – – lorsqu’on arrive fraĂźchement au seuil de maĂźtrise (parfois appelĂ© maturitĂ© mathĂ©matique) — qu’on est le mieux placĂ© pour apporter une contribution crĂ©ative en mathĂ©matiques ; alors on peut passer sa vie Ă  explorer les implications de ces idĂ©es virginales. AprĂšs une exposition plus longue, des ensembles improductifs se forment et il est difficile de s’en sĂ©parer. Il se peut que s’ils avaient changĂ© de domaine ou s’ils Ă©taient arrivĂ©s aux mathĂ©matiques plus tard, ces mĂȘmes individus prĂ©coces auraient fait preuve d’une crĂ©ativitĂ© « plus tardive ». Il est indĂ©niable, cependant, qu’il existe des effets sur le cycle de vie – et sur les traits – de la crĂ©ativitĂ©, quel que soit le moment ou le domaine de prĂ©paration de chacun. Les idĂ©es et les compĂ©tences des historiens et des Ă©crivains, par exemple, ont tendance Ă  mĂ»rir plus tard dans la vie, peut-ĂȘtre parce qu’elles dĂ©pendent d’une « prĂ©paration » plus longue et moins concentrĂ©e, ou parce que les compĂ©tences verbales mĂ»rissent plus tard.

Mais malgrĂ© le danger omniprĂ©sent d’ĂȘtre victime d’ensembles non crĂ©atifs, s’il existe une « mĂ©thode » crĂ©atrice, c’est bien la « pasteurisation », le « trait » crĂ©atif ne reprĂ©sentant peut-ĂȘtre rien de plus qu’une forme rare de rĂ©sistance ou d’immunitĂ© Ă  la contagion de convention malgrĂ© une exposition importante.

Facteurs intuitifs et esthĂ©tiques. Les thĂ©ories qui font appel Ă  « l’intuition » et Ă  « l’esthĂ©tique » comme guides de la crĂ©ativitĂ© appartiennent, comme dĂ©jĂ  mentionnĂ©, Ă  la catĂ©gorie « mĂ©moire ». Outre ce qui a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© dit, il est instructif de rĂ©flĂ©chir Ă  l’anecdote de Bertrand Russell (basĂ©e sur une histoire qu’il a entendue de William James) Ă  propos de l’homme qui, lorsqu’il reniflait du protoxyde d’azote (gaz hilarant), connaissait le secret de l’univers, mais qui, lorsqu’il se dissipait, l’oubliait toujours. Un jour, il a dĂ©cidĂ© de l’écrire sous influence. Lorsque les effets se sont attĂ©nuĂ©s, il s’est prĂ©cipitĂ© pour voir ce qu’il avait Ă©crit. C’Ă©tait : « L’odeur du pĂ©trole se rĂ©pand partout. » Ce que Russell a pris cette anecdote pour suggĂ©rer, c’est que l’intuition peut aussi ĂȘtre un faux guide. Si l’on se laisse guider uniquement par son sens intuitif ou esthĂ©tique de la profondeur, on peut alors ĂȘtre amenĂ© Ă  attribuer une signification cosmique Ă  un non-sens. Ainsi Russell a suggĂ©rĂ© que, s’il peut ĂȘtre bien beau de se laisser influencer par des considĂ©rations esthĂ©tiques (ce que les mathĂ©maticiens ont appelĂ© « beautĂ© », « Ă©lĂ©gance », etc.), il faut garder Ă  l’esprit que ces intuitions subjectives doivent rĂ©pondre Ă  des questions d’ordre esthĂ©tique. des tests objectifs ensuite (dans le cas des mathĂ©matiques, une prouvabilitĂ© rigoureuse), et qu’il ne faut pas se laisser emporter par ses « Ă©piphanies » subjectives.

Il faut cependant ajouter, en faveur de l’intuition, et peut-ĂȘtre de l’abduction, qu’en mathĂ©matiques il semble y avoir un « trait », que seuls quelques trĂšs rares mathĂ©maticiens trĂšs douĂ©s possĂšdent, celui d’ĂȘtre capable de formuler Ă  plusieurs reprises des conjectures intuitives qui s’avĂšrent par la suite avoir raison. Certains vont mĂȘme jusqu’à dire que cette capacitĂ© Ă  deviner ce qui est vrai est le vĂ©ritable gĂ©nie des mathĂ©matiques, et non la capacitĂ© Ă  produire des preuves rigoureuses. Bien sĂ»r, les deux vont de pair, et il n’y a pas de meilleur guide pour construire des preuves qu’un sens intuitif de ce qui s’avĂ©rera vrai et de ce qui sera faux. Quoi qu’il en soit, le rĂŽle des intuitions prĂ©verbales, perceptuelles et esthĂ©tiques ne doit pas ĂȘtre sous-estimĂ© dans la crĂ©ativitĂ©. Notez Ă©galement que l’esthĂ©tique n’est pas nĂ©cessairement innĂ©e. Certains « goĂ»ts » peuvent ĂȘtre acquis par prĂ©paration, par analogie avec d’autres domaines d’expĂ©rience, voire par hasard.

Anomalie. Une autre « recette » pour la crĂ©ativitĂ©, le modĂšle axĂ© sur la prĂ©paration/l’anomalie, est une mĂ©thode basĂ©e sur l’observation que les idĂ©es crĂ©atives sont souvent provoquĂ©es par la rencontre d’une anomalie ou par l’Ă©chec des solutions existantes. Il n’est pas clair si cette variable est vĂ©ritablement causale ou simplement situationnelle (c’est-Ă -dire que lĂ  oĂč il doit y avoir une solution crĂ©ative, il doit d’abord y avoir un problĂšme), mais ce qui doit finalement provoquer une solution crĂ©ative est Ă©videmment une sorte d’Ă©chec des solutions non crĂ©atives. . Parfois, le simple fait de dĂ©couvrir qu’une rĂšgle fidĂšle ne fonctionne pas de maniĂšre inattendue dans certains types de cas nous met dans la bonne direction. Le rĂ©sultat, en cas de succĂšs, est une rĂ©vision de tout un cadre afin de tenir compte de l’anomalie et en mĂȘme temps de considĂ©rer les solutions antĂ©rieures comme des cas particuliers. John Kemeny disait : « Si je rencontre quelque chose de nouveau, j’essaie d’abord de l’intĂ©grer dans mon systĂšme ; si je n’y arrive pas, j’essaie de le rejeter [comme Ă©tant faux ou non pertinent] ; si cela Ă©choue, alors j’essaie de rĂ©viser mon systĂšme. pour l’ adapter ).” (Et, dans une variante lĂ©gĂšrement magique, Russell ajoute : « Si tout le reste Ă©choue, je le confie Ă  mon inconscient jusqu’Ă  ce que quelque chose apparaisse. »)

MalgrĂ© le rĂŽle de l’anomalie en tant que stimulus (et condition prĂ©alable logique) Ă  la crĂ©ativitĂ©, il ne s’agit cependant pas d’une mĂ©thode fiable, comme doivent en tĂ©moigner d’innombrables rencontres non crĂ©atives (et infructueuses) avec des anomalies. Les anomalies peuvent servir Ă  briser des ensembles, mais elles peuvent aussi en crĂ©er, sous la forme de tentatives rĂ©pĂ©tĂ©es et infructueuses de rĂ©solution. Pourtant, il est indĂ©niable que l’histoire de la construction thĂ©orique en science peut ĂȘtre dĂ©crite comme une rĂ©vision et une subsomption motivĂ©es par des anomalies. [1]

Contraintes. Une autre « mĂ©thode » est suggĂ©rĂ©e par les vues de Stravinsky sur le rĂŽle crĂ©atif des « contraintes » dans ce qu’il appelle la « rĂ©solution de problĂšmes ». [2] Stravinsky a expliquĂ© pourquoi il a continuĂ© Ă  composer de la musique tonale aprĂšs que la plupart des compositeurs aient abandonnĂ© le systĂšme tonal en disant que « vous ne pouvez pas crĂ©er avec un mĂ©dium souple Â». Il avait besoin du systĂšme tonal comme d’une contrainte Ă  l’intĂ©rieur de laquelle il pouvait exercer sa crĂ©ativitĂ©.

Le point de vue de Stravinsky pourrait bien ĂȘtre une variante du thĂšme de la « prĂ©paration », car si « quelque chose se passe » (en raison d’une prĂ©paration insuffisante), rien de crĂ©atif ne peut se produire. C’est pourquoi Stravinsky considĂ©rait toute crĂ©ativitĂ© comme une solution Ă  un problĂšme. Il estimait qu’un mĂ©dium crĂ©atif ne pouvait pas ĂȘtre infiniment flexible, infiniment « libre ». Il lui a fallu rĂ©sister d’une maniĂšre ou d’une autre (peut-ĂȘtre en suscitant des anomalies, des problĂšmes) pour permettre Ă  la crĂ©ativitĂ© de s’exercer, voire de se dĂ©finir. Pendant la majeure partie de sa vie, Stravinsky a personnellement prĂ©fĂ©rĂ© le systĂšme tonal classique comme contrainte, s’efforçant d’y crĂ©er des innovations ; d’autres, comme les compositeurs dodĂ©caphoniques, ont rejetĂ© la tonalitĂ©, la remplaçant par un autre systĂšme de contraintes (peut-ĂȘtre, pensent certains, des contraintes abductivement « contre nature », ce qui suggĂšre que mĂȘme dans les arts, les contraintes ne peuvent pas ĂȘtre entiĂšrement arbitraires). Mais Stravinsky voulait dire qu’il ne peut y avoir de crĂ©ativitĂ© sans problĂšmes, pas de problĂšmes sans contraintes, pas de contraintes sans prĂ©paration. Les rĂšgles peuvent ĂȘtre conçues pour ĂȘtre brisĂ©es de maniĂšre crĂ©ative, mais elles doivent ĂȘtre maĂźtrisĂ©es avant de pouvoir ĂȘtre modifiĂ©es ou abandonnĂ©es, et il doit toujours y en avoir de nouvelles pour les remplacer.

Il y a peut-ĂȘtre ici une leçon pour les partisans d’une libertĂ© crĂ©ative « dĂ©licate » (de prĂ©fĂ©rence Ă  la « pasteurisation ») dans l’éducation prĂ©scolaire. Cette stratĂ©gie reprĂ©sente probablement encore une autre forme de « formation Ă  la crĂ©ativitĂ© » inefficace et peut-ĂȘtre mĂȘme contre-productive. Bien qu’in fine souhaitable et mĂȘme nĂ©cessaire Ă  la crĂ©ativitĂ©, la libertĂ© (l’absence de contrainte) rend aussi logiquement la crĂ©ativitĂ© impossible avant la prĂ©paration. De plus, la libertĂ© peut avoir plus Ă  voir avec ce que vous ĂȘtes qu’avec ce que vous faites, la formation Ă©tant donc mieux destinĂ©e Ă  vous montrer d’abord comment suivre les rĂšgles plutĂŽt que comment les bafouer. Peut-ĂȘtre qu’étudier les vĂ©ritables exemples de libertĂ© crĂ©ative – et leur Ă©volution historique en temps rĂ©el – serait plus utile et stimulant que d’inculquer des libertĂ©s lĂ©gendaires dans un moyen de vƓux pieux : la crĂ©ativitĂ© des gĂ©nĂ©rations futures est plus susceptible d’ĂȘtre maximisĂ©e par des idĂ©es inspirĂ©es. que par une pĂ©dagogie indulgente.

SĂ©rendipitĂ©. La classe de thĂ©ories que l’on pourrait appeler l’école du « hasard cĂ©rĂ©bral » (Ă  laquelle appartenaient Einstein et PoincarĂ©) sont les thĂ©ories de la mutation, mettant l’accent sur le rĂŽle crucial du hasard dans la crĂ©ativitĂ©. Bien sĂ»r, Pasteur le croyait aussi. Le scĂ©nario consiste Ă  rassembler les Ă©lĂ©ments et les contraintes Ă  partir desquels une solution crĂ©ative est (espĂ©rĂ©e) surgir, puis Ă  confier le reste au « jeu combinatoire » (inconscient) du hasard, l’intuition aidant peut-ĂȘtre Ă  suggĂ©rer quelles combinaisons pourraient ĂȘtre fructueux. Cette vision apporte une clarification importante du rĂŽle de la prĂ©paration, car sans prĂ©paration, les Ă©lĂ©ments essentiels Ă  partir desquels une combinaison fortuite pourrait naĂźtre seraient tout simplement absents, mĂ©connus ou mĂ©connus.forme

Analogue mental. Il existe certains modĂšles spĂ©culatifs « mentaux analogiques », appartenant Ă  la classe de la mĂ©moire, qui suggĂšrent que parfois la structure d’un problĂšme et sa solution peuvent avoir des contreparties analogiques dans l’esprit. Des « catastrophes » mentales et des « transitions de phase » rĂ©sultant de modĂšles mentaux rĂ©ellement codĂ©s dans le cerveau et rĂ©gis par la thĂ©orie mathĂ©matique des catastrophes ou la thĂ©orie fractale ont Ă©tĂ© suggĂ©rĂ©es, entre autres. Celles-ci sont encore trop spĂ©culatives pour ĂȘtre envisagĂ©es, mais quelque chose de ce genre pourrait en principe servir de mĂ©diateur Ă  des solutions abductives, voire acquises.

StratĂ©gies heuristiques. Une autre classe de mĂ©thodes dĂ©coule des suggestions (par exemple, celles de Polya) de s’engager dĂ©libĂ©rĂ©ment dans l’heuristique — faire un Ă©chantillonnage alĂ©atoire ou mĂ©canique par essais et erreurs, tester des analogies et des conjectures inductives, etc. — comme discutĂ© plus tĂŽt. Ces stratĂ©gies pourraient ĂȘtre mieux dĂ©crites comme la phase heuristique de prĂ©paration. Ils ne peuvent clairement rien garantir, mĂȘme s’ils peuvent augmenter la probabilitĂ© d’un coup de chance dans un esprit par ailleurs prĂ©parĂ©.

Improvisation et performance. Un cas particulier combinant les « mĂ©thodes » heuristiques, esthĂ©tiques et analogiques est suggĂ©rĂ© par les arts du spectacle, qui font preuve de crĂ©ativitĂ© « en temps rĂ©el », « en ligne » tout en exĂ©cutant, interprĂ©tant et, surtout, improvisant sur les codes formels crĂ©Ă©s par les compositeurs. et des dramaturges. Les partitions musicales et les scĂ©narios thĂ©Ăątraux, ainsi que la formation aux arts du spectacle, constituent les contraintes et la prĂ©paration, tandis que la reprĂ©sentation elle-mĂȘme, si elle n’est pas simplement mĂ©canique mais innovatrice et expressive, est « l’acte » crĂ©ateur.

Il existe de nombreuses idĂ©es fausses selon lesquelles la performance serait en quelque sorte une crĂ©ativitĂ© dĂ©rivĂ©e ou de second ordre. Ceci est une erreur. Chaque mĂ©dium de crĂ©ation a ses propres contraintes, ses propres « donnĂ©es ». Et tous laissent place Ă  l’originalitĂ© et Ă  l’innovation, bref au gĂ©nie. Les arts du spectacle peuvent en fait ĂȘtre particuliĂšrement rĂ©vĂ©lateurs de la crĂ©ativitĂ©, car ils « l’externalisent », pour ainsi dire, la faisant se produire sous vos yeux. Les leçons que l’on en tire sont familiĂšres : beaucoup de prĂ©paration et d’artisanat, une imitation considĂ©rable du passĂ©, un sens esthĂ©tique guidant son goĂ»t en matiĂšre d’innovation, ainsi que la capacitĂ© et l’envie de faire quelque chose de valable, de convaincant et de nouveau avec la matiĂšre premiĂšre. Avant que les arts « crĂ©atifs » et « du spectacle » ne soient sĂ©parĂ©s, on aurait pu observer de ses propres yeux un poĂšte-mĂ©nestrel interprĂšte, captivĂ© par un moment inspirĂ© – guidĂ© par sa muse – Ă©laborer un conte hĂ©ritĂ© (prĂ©parĂ©) d’une maniĂšre nouvelle et inspirĂ©e lors d’une performance improvisĂ©e.

ComplĂ©mentaritĂ©. Enfin, parmi les mĂ©thodes, il faut mentionner le rĂŽle des efforts collaboratifs, cumulatifs et complĂ©mentaires dans le jeu combinatoire entre de nombreux esprits diffĂ©rents (peut-ĂȘtre diffĂ©rentiellement « favorisĂ©s » par des dons intellectuels et crĂ©atifs) pour maximiser la probabilitĂ© d’un rĂ©sultat crĂ©atif et commun. Les arts du spectacle suggĂšrent dĂ©jĂ  que la crĂ©ativitĂ© n’est pas un processus statique, et peut-ĂȘtre mĂȘme pas un processus individuel. Il existe une spĂ©cialisation complĂ©mentaire dans tous les domaines de crĂ©ation : compositeur/interprĂšte, acteur/rĂ©alisateur, expĂ©rimentateur/thĂ©oricien, conjectureur intuitif/vĂ©rificateur de thĂ©orĂšmes rigoureux. Et puis il y a la relation complĂ©mentaire la plus fondamentale de toutes : la relation du prĂ©sent au passĂ©. La prĂ©paration d’une personne prend invariablement la forme des produits crĂ©atifs de ses prĂ©dĂ©cesseurs. Ils ont fourni les contraintes sur un mĂ©dium autrement productif dans lequel chacun peut alors tenter sa propre chance d’apporter une contribution crĂ©ative.

Conclusions

La crĂ©ativitĂ© est un phĂ©nomĂšne soumis Ă  des contraintes Ă  la fois externes et internes. Les facteurs externes concernent l’état historique du domaine problĂ©matique et le rĂŽle de l’imprĂ©visible. Les internes concernent la façon dont l’esprit est prĂ©parĂ© et « favorisĂ© » (dotĂ©). Bien qu’il existe certaines mĂ©thodes heuristiques que l’on peut essayer (telles que l’induction par essais et erreurs et l’analogie), la meilleure stratĂ©gie que l’on puisse adopter pour maximiser les chances de crĂ©ativitĂ© est de maximiser la prĂ©paration. Cependant, la maximisation n’est pas la mĂȘme chose qu’une garantie ; MĂȘme si elle n’est pas magique, la crĂ©ativitĂ© restera toujours mystĂ©rieuse en raison de la rĂšgle essentielle de l’inattendu et de l’imprĂ©visibilitĂ© dans ses conditions qui la dĂ©finissent. La prĂ©paration ne peut offrir qu’un cadre favorable au hasard, pas un cadre certain. De plus, il est peu probable que le hasard ou la libertĂ© – c’est-Ă -dire une propension indĂ©pendante au fortuit – puissent ĂȘtre instruits. Outre la prĂ©paration spĂ©cifique au problĂšme et l’ouverture d’esprit, la seule stratĂ©gie qui reste Ă  chacun est d’ĂȘtre prĂȘt, compte tenu de ses ressources mentales, physiques et expĂ©rientielles, Ă  passer (temporairement ou dĂ©finitivement) Ă  d’autres domaines de problĂšmes crĂ©atifs potentiels moyennant un effort suffisamment dĂ©vouĂ© et patient. se termine par des boucles improductives et persĂ©vĂ©rantes : trouver sa vocation crĂ©ative (si elle existe) peut elle-mĂȘme nĂ©cessiter un Ă©chantillonnage (prĂ©parĂ©) d’essais et d’erreurs, guidĂ©, peut-ĂȘtre, par les prĂ©ceptes natifs ou acquis de son jugement esthĂ©tique, mais toujours dĂ©pendant de succĂšs au grĂ© des alĂ©as du hasard.

Lectures suggĂ©rĂ©es : Noir, modĂšles et mĂ©taphores ; Hadamard, La psychologie de l’invention dans le domaine mathĂ©matique ; Harnad, MĂ©taphore et dualitĂ© mentale ; Hesse, ModĂšles et analogies en science ; Stravinsky, La PoĂ©tique de la musique ; Polya, comment le rĂ©soudre .

Notes de bas de page

1. Les nouveaux « paradigmes », mĂȘme s’ils impliquent des innovations Ă©tonnamment audacieuses, doivent nĂ©anmoins ĂȘtre proportionnĂ©s au passĂ©, au moins dans le sens de l’englober comme un cas particulier (par exemple, la thĂ©orie de la Terre plate, qui restera toujours approximativement vraie ). ); cela montre que la construction d’une thĂ©orie est en rĂ©alitĂ© une sĂ©rie cumulative et peut-ĂȘtre interminable d’approximations de plus en plus Ă©troites convergeant vers la « vĂ©ritĂ© ». 

2. Il faut garder Ă  l’esprit que la suggestion de Stravinsky peut ĂȘtre particuliĂšre Ă  la crĂ©ativitĂ© artistique, oĂč les contraintes peuvent ĂȘtre imposĂ©es de l’intĂ©rieur, pour ainsi dire, contrairement Ă  la science et aux mathĂ©matiques, oĂč elles viennent de l’extĂ©rieur : de la rĂ©alitĂ© extĂ©rieure et du cadre formel. monde de cohĂ©rence logique et mathĂ©matique.

3. Les lecteurs souhaitant se forger leur propre jugement sur certaines des mĂ©thodes existantes de formation Ă  la crĂ©ativitĂ© des adultes voudront peut-ĂȘtre lire un livre ou assister Ă  un sĂ©minaire sur le « brainstorming », la « synectique », la « pensĂ©e latĂ©rale » ou quelque autre sujet similaire. Ou vous pouvez goĂ»ter aux offres de toute organisation Ă©galement spĂ©cialisĂ©e dans les week-ends sur la « renaissance » et « faire des miracles pour vous ». Ne soyez pas dĂ©routĂ© par le fait que l’adjectif « crĂ©atif » aura tendance Ă  ĂȘtre librement ajoutĂ© Ă  la plupart des offres disponibles, quels que soient leurs avantages spĂ©cifiques.